Voir ci-dessous la dépêche AFP par Dorothée MOISAN
PARIS (AFP) — Le combat mené par les jeunes avocats parisiens pour dénoncer l'insalubrité du dépôt du TGI de Paris a porté ses fruits, la Chancellerie débloquant jeudi un million d'euros pour rénover cet été les sous-sols du Palais de justice, après l'annulation de plusieurs procédures de comparution immédiate.
"Cette décision est la démonstration exacte que c'était insuffisant et que la justice peut, quand elle le veut, faire bouger les pouvoirs publics", se félicitait Me Pierre de Nayves, l'un des avocats ayant lancé le mouvement de contestation.
Le 16 avril, les 12 secrétaires de la Conférence, ces avocats qui représentent le jeune barreau parisien et assurent la défense pénale des plus démunis, étaient entrés en croisade contre les conditions "inhumaines" du dépôt, selon eux exigu, sale et délabré.
Depuis un mois, ils profitaient d'audiences de comparution immédiate pour plaider la nullité des procédures en cours.
Jeudi soir, la Chancellerie se refusait pourtant à faire un lien entre les annulations de comparutions immédiates prononcées à 18H30 par la 23e chambre correctionnelle de Paris et son communiqué de 19H00 dans lequel elle annonçait avoir décidé "d'affecter en urgence" un million d'euros pour rénover le dépôt à partir de juillet 2009.
"C'est le fruit de plusieurs semaines de travail", se bornait à expliquer son porte-parole, Guillaume Didier, assurant que le million d'euros débloqué l'aurait été "quelle qu'ait été la décision" du tribunal.
Quelques minutes plus tôt, celui-ci avait annulé trois procédures de comparution immédiate, au motif que les conditions de détention des prévenus n'étaient "pas décentes", et donc "non conformes" à la Convention européenne des droits de l'Homme.
Le 2 mai, les avocats parisiens avaient obtenu la désignation d'un magistrat pour visiter les sous-sols du Palais.
Dans son rapport, dévoilé jeudi à l'audience de la 23e chambre, Pascal Gand a décrit des cellules collectives "vétustes et exiguës", sans intimité, dépourvues de matelas, avec des chasses d'eau actionnées de l'extérieur et du papier toilette à réclamer feuille à feuille aux agents du dépôt.
"Les locaux spécialement aménagés constituent bien une formalité substantielle" que doit remplir le tribunal, a tranché la présidente Christine Servella-Huertas.
"Des cellules sans matelas ne permettent pas des conditions de repos satisfaisantes", a-t-elle souligné, avant de déplorer certaines "odeurs nauséabondes".
Elle a donc "déclaré la nullité" des trois procès-verbaux de comparution immédiate. Si les trois prévenus sont ressortis libres du tribunal, "les poursuites seront certainement reprises", a prévenu la présidente. La saisine du tribunal a été annulée en raison de l'insalubrité du dépôt, mais le parquet peut engager de nouvelles poursuites contre les délinquants présumés.
"Ce qui est déterminant, c'est qu'un juge se soit rendu au dépôt", soulignait Me Matthieu Brochier, l'un des secrétaires de la Conférence, se félicitant d'"un progrès pour la justice".
Quant au parquet, il a d'ores et déjà fait appel. Or, la cour d'appel de Paris a déjà jugé, dans une affaire concernant le dépôt de Créteil, que les mauvaises conditions de détention ne pouvaient justifier l'annulation de procédures de comparution immédiate.